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RESTORE : rénovation performante des maisons individuelles

Entretien avec Olivier Greslou, responsable Stratégie et Recherche de la division Rénovation, et Miguel d’Arcangues, responsable du pôle Opérations de la division Rénovation, direction Énergie-Environnement, CSTB

En quoi le projet RESTORE, suite du projet RénoStandard, œuvre-t-il en faveur de la massification de la rénovation ?

Olivier Greslou : RESTORE, issu du programme PROFEEL, concerne la rénovation des maisons individuelles, qui représentent la part majoritaire des consommations d’énergie des logements en France. Cette partie du parc de bâtiments est particulièrement difficile à traiter en termes de rénovation globale et performante. Rénover une maison coûte cher et demande une logistique qui peut être compliquée à gérer pour les particuliers, d’autant plus lorsque la maison est occupée. Il est donc difficile de créer une dynamique.

L’histoire de la construction nous enseigne que plusieurs techniques constructives et courants architecturaux ont coexisté au XXe siècle. Un grand nombre de maisons sont donc de construction semblable. La classification des maisons individuelles en vue de définir les différentes typologies présentes sur le territoire aux échelles régionale et nationale est au cœur de notre démarche. Il s’agit ensuite de déterminer quels types de maisons représentent le plus important gisement d’économies d’énergie et d’amélioration de la qualité du logement, mais aussi d’évaluer le potentiel de massification des approches de rénovation globale sur les typologies les plus répandues.

À quels acteurs de la filière RESTORE s’adresse-t-il ?

Miguel d’Arcangues : Une rénovation performante nécessite la coordination de plusieurs entreprises expertes dans leurs corps d’état respectifs. L’idée est de parvenir à faire travailler ensemble ces TPE-PME du bâtiment pour proposer des projets globaux de rénovation aux particuliers. Les artisans, les entreprises de travaux, les maîtres d’œuvre (architectes, bureaux d’études), les concepteurs d’innovations ou fabricants de solutions techniques, les professionnels de la coordination et les professionnels de l’accompagnement sont ainsi nos cibles principales. Le but de RESTORE est d’outiller ces différents intervenants en phases programmation, conception et chantier, du diagnostic initial à la mesure de la performance en passant par la conception et la mise en œuvre. Nous les aidons à consolider une vision globale d’une rénovation efficace, performante et pérenne de la maison, et les poussons à s’inspirer de projets préconçus pour des constructions similaires, qu’ils vont pouvoir adapter aux besoins, contraintes et envies des ménages.

Quelles sont les principales évolutions de RESTORE ?

Avec RénoStandard, nous avons travaillé sur quelques types de maisons répandus et contrastés, proposés par des groupements de professionnels, sans chercher à les prioriser à l’échelle nationale. Avec RESTORE, nous avons consolidé une classification typologique nationale de référence et testons certaines solutions théoriques sur le terrain. En parallèle, nous accompagnons de nouveaux groupements concepteurs qui vont travailler sur des typologies de maisons très répandues en France, mais aussi sur plusieurs variantes de projets de rénovation et solutions techniques, choisis en fonction des caractéristiques techniques et variantes architecturales de la maison type, du budget et des besoins des ménages. Cela permet d’obtenir une gamme de solutions techniques plus conséquente pour enrichir l’offre technique au service de la massification. Dans le cadre de RESTORE, nous demandons désormais aux groupements que nous conventionnons de simuler leurs projets de rénovation globale en prenant en compte la dimension confort d’été à moyen et long termes. La circularité et l’impact carbone font également partie des aspects auxquels nous prêtons attention dans les projets. Nous nous intéressons à l’emploi de matériaux recyclés, mais aussi locaux et biosourcés. Les projets de rénovation s’appuient davantage sur une approche multicritère qui permet d’améliorer grandement la performance et la qualité globales des bâtiments, et donc le confort des occupants.

La recherche et l’innovation sont au cœur de RESTORE. Comment s’articulent-elles ?

Restore est couplé au programme de recherche du CSTB dédié à la « Réhabilitation multicritère des bâtiments » qui mobilise de nombreuses expertises complémentaires au service de la massification de la rénovation performante. Projet transverse, pluridisciplinaire et intégrateur, RESTORE fait intervenir neuf directions opérationnelles du CSTB et vient mettre en musique des protocoles développés dans d’autres projets PROFEEL (mesure de la performance thermique avant et après rénovation avec la méthode SEREINE, mesure des consommations d’énergie, de la qualité de l’air intérieur et du confort des bâtiments après rénovation via les protocoles issus du projet QSE). Cette dimension expérimentale, qui s’apparente finalement à de la recherche appliquée, se retrouve sur le terrain avec, sur les 11 projets de référence issus de RénoStandard, huit chantiers déployés sur trois territoires (Normandie, métropole de Lille et agglomération du Grand Chambéry). Projet à deux échelles, RESTORE fait intervenir à la fois des solutions techniques traditionnelles et, sur certains lots, des innovations techniques dont nous accompagnons la conception. Celles-ci concernent notamment l’isolation thermique de la toiture et des murs, à l’aide de solutions hors site et du recours aux isolants biosourcés, et le traitement des interfaces entre lots. L’enjeu sera, demain, de faciliter leur assurabilité.

L’instrumentation des chantiers nous permet de suivre les étapes de mise en œuvre par les groupements et de tester ces différentes solutions techniques en alertant sur les points de vigilance et en fournissant des pistes d’optimisation. Dans le même temps, nous développons des outils pour déterminer leur potentiel de réplicabilité (sur d’autres typologies, sur les aspects logistique et commercial…) et conduisons également une analyse des filières locales et nationales pour évaluer le potentiel de massification de ces solutions. À titre d’illustration, nous réalisons en 2024 une étude sur les opportunités de développement de la filière préfabrication pour les TPE-PME du bâtiment. La prochaine étape sera de finaliser notre approche basée sur la connaissance typologique du bâti et de ses éléments en travaillant sur deux axes, en cours de développement : un module d’identification des typologies dans la BDNB, et un diagnostic technique et architectural rapide des maisons sur le terrain, pour évaluer la compatibilité technique de solutions de rénovation avec les caractéristiques et l’état du bâti. Nous travaillons également sur un protocole global d’évaluation d’un chantier, avant, pendant et après la rénovation, à partir des protocoles séparés que nous expérimentons.

Nous chercherons également à dynamiser les filières locales et régionales en faisant connaître nos solutions aux professionnels via un ensemble de contenus adaptés dans des formats complémentaires. La diffusion est travaillée avec de multiples relais locaux et régionaux (collectivités, associations, réseaux professionnels, centres de ressources, etc.) et via l’organisation d’événements sur plusieurs territoires cibles.